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19 Décembre 2016
Manga Seinen Gekiga de Gô Fujio
D'après l'oeuvre de Takiji Kobayashi
(Roman écrit 1929 disponible en France chez Alia depuis 2016)
One shot édité chez Akata
Thème: Drame, histoire, fait de société
Synopsis :
Dans les années 20, au Japon… L'industrialisation du pays fait rage, tandis qu'en Russie, la Révolution vient de s'achever. Au port de Hakodate, c'est l'effervescence : le bateau-usine s’apprête à partir en mer, pour pêcher des crabes qui seront revendus à prix d'or. Mais les ouvriers-pécheurs ne se doutent pas encore du destin qui les attend… Exploités, battus et spoliés par Asakawa, l'intendant du navire qui ne pense qu'aux bénéfices de l'entreprise qu'il représente, ils vivront un véritable enfer quotidien. Pourtant, quand le bateau échappe au naufrage, grâce à l'aide d'un chalutier russe, les esprits commencent à s'échauffer. Un jeune étudiant, influencé par les romans de Dostoïevski, décide de prendre la tête d'un mouvement de rébellion… La grève est ouverte !
Alors qu'on attendait une belle collection qui ferait suite à l'argent du déshonneur, Akata nous fait le plaisir de poursuivre avec une autre oeuvre tout aussi poignante si ce n'est plus: Le bateau-usine. Ce manga est un drame humain, donc social dans lequel chacun joue son vrai rôle, celui d'un esclave qu'on appelle ouvrier. Le roman de Takiji Kobayashi, auteur contestataire, mort sous la torture en 1933, est ici proposé sous la forme d'un grand manga: "Kanikousen, le combat des crabes" dessiné par Gô Fujio, nous dévoile une réalité passée aussi choquante qu'émouvante.
L'histoire commence sur une scène de deuil, celui de l'auteur du livre. Puis on est immergé dans le bateau-usine, là les ouvriers pêchent et travaillent jusqu'à en mourir pour que d'autres puissent avoir une vie de nantis. On y découvre les conditions de travail horribles, inhumaines; les menaces de mort envers ceux qui oseraient se plaindre et le fait que les ouvriers soient considérés comme sans valeur par rapport à la cargaison, qui elle est vendable...
Leur maigre salaire quand il leur est versé suffit à peine à faire vivre une famille et le traitement qu'on leur réserve est du même niveau que le bagne. Sont ils des prisonniers ? Non. Sont ils des esclaves ? Non. Ces hommes sont des ouvriers du bateau-usine...
Un événement dramatique se produit et la façon dont la crise est gérée va soulever une colère noire qui se diffusera parmi les ouvriers. Un meneur prendra la tête d'une révolte au sein du bateau.
Riche de préface et postface qualitatifs et d'une biographie de l'auteur très détaillée, ce manga incite le lecteur à réfléchir et à s'intéresser aux drames passés sous silence pour d'obscures raisons. La capitalisme des années 20 n'avait rien à envier à l'esclavagisme.
Le bateau-usine est une oeuvre riche et émouvante, difficile en effet de suivre l'histoire de ces hommes sans ressentir leur souffrance. On a envie de leur crier : "Ne vous laissez pas faire !"
Ce manga est à acheter de toute urgence si ce n'est pas déjà fait.
Séverine Chougny / Le 19-12-16